Quatre images mettant en scène des actes sexuels entre une jeune femme et des gendarmes mobiles de l’escadron d’Antibes ont circulé sur des boucles réservées aux forces de l’ordre. Gênée par l’affaire, la gendarmerie refuse de dire si elle a ouvert une enquête.


Début novembre 2023, quatre photos pornographiques ont été diffusées sur des groupes Facebook en théorie réservés aux gendarmes, puisque pour être admis il faut donner son numéro Nigend (un numéro d’identification propre aux gendarmes actifs et retraités).

Sur la première, on voit une femme nue, de dos, couchée sur le ventre. Le manche d’un tonfa, chaussé d’un préservatif, est inséré dans son anus. Sur sa fesse droite est posé l’écusson de l’escadron de gendarmerie mobile d’Antibes.

Sur la deuxième, le canon d’un Sig-Sauer Pro, l’arme de service des policiers et gendarmes, également équipé d’un préservatif, pénètre son vagin.

Sur la troisième, cette femme blonde est vêtue d’un polo bleu gendarmerie et pratique une fellation sur un homme, également vêtu d’un polo gendarmerie, qui la tient en laisse.

Sur la quatrième, la jeune femme ne porte plus de polo mais un tonfa en bandoulière dans son dos. Elle pratique une fellation sur deux hommes, vêtus d’un polo gendarmerie, dont l’un (avec l’écusson d’Antibes visible sur son épaule) la tient en laisse.

Bien que supprimées quelques jours après leur publication, ces photos ont été transmises à Mediapart par un gendarme, membre des groupes Facebook en question, pour qui le comportement de ses collègues « nuit à l’image de la gendarmerie ». Elles ont également circulé jusque dans les rangs de la police, comme ont pu nous le rapporter deux policiers qui les avaient reçues.

Selon ces fonctionnaires, les images ont été prises dans les locaux de l’escadron d’Antibes. L’une de ces sources précise que cette unité de gendarmes mobiles est composée de « jeunes plutôt sportifs », dont certains auraient été reconnus par leurs collègues. Depuis le mois de novembre, ils ignorent quelles suites ont été données par l’institution.

Ces images posent plusieurs questions déontologiques importantes : l’éventuel usage de locaux professionnels pour ce type d’activités, l’utilisation d’armes de service comme sextoys, le consentement donné, ou pas, par la jeune femme visible sur ces images à ce qu’elles soient diffusées.

Sollicité à plusieurs reprises par Mediapart, le service de presse de la gendarmerie nationale a refusé de confirmer ou d’infirmer l’ouverture d’une enquête administrative, ainsi que de répondre à la moindre question sur le contexte de ces photographies ou les éventuelles suites disciplinaires. Sa seule réponse : « La gendarmerie ne souhaite pas s’exprimer sur le sujet. »

Il n’a par ailleurs apporté aucun éclaircissement sur la date et le lieu de ces prises de vue, l’occasion de la présence de la jeune femme, le caractère rémunéré ou non de sa « prestation », ou encore un éventuel signalement à l’autorité judiciaire.

Dans son dernier rapport d’activité, l’Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN) reprenait un extrait du discours de son chef d’alors, Alain Pidoux, lors d’un baptême de promotion. Ce jour-là, le général rappelait à ses troupes que « l’exemplarité de tous les instants n’est pas une option » et qu’elle ne « doit pas être vécue comme une contrainte mais comme une chance, un honneur ». « Cultivez cette haute exigence morale », ajoutait Alain Pidoux, citant Françoise Sagan : « Ce n’est pas parce que la vie n’est pas élégante qu’il faut se comporter comme elle. »